Harcèlement moral au travail
- 5 mars 2018 - Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre), Ministère chargé de la justice
Le harcèlement moral est un délit. Il entraîne la dégradation des conditions de travail. Il est puni dans le secteur privé comme dans le secteur public. La loi organise la protection des salariés, des agents publics et des stagiaires.
Le harcèlement moral se manifeste par des agissements malveillants répétés : remarques désobligeantes, intimidations, insultes.
Ces agissements entraînent une forte dégradation des conditions de travail de la victime, et peuvent :
- porter atteinte à ses droits et à sa dignité,
- altérer sa santé physique ou mentale,
- ou compromettre son avenir professionnel.
Si vous êtes victime de harcèlement moral dans le secteur public, vous pouvez bénéficier de la protection de la loi, que vous soyez fonctionnaire titulaire, contractuel ou stagiaire.
Ces agissements sont interdits, même en l'absence de lien hiérarchique avec l'auteur des faits.
Pour vous défendre, vous avez le droit de recourir à l'une des procédures suivantes ou à plusieurs d'entre elles en même temps.
Alerter le CSE (ex CHSCT) et des représentants du personnel
En cas de harcèlement moral, vous pouvez prévenir :
- les représentants du personnel, ils pourront vous aider dans toutes vos démarches.
- ou le CSE (ex CHSCT) qui dispose d'un droit d'alerte qui lui permet de prévenir l'administration de tout cas de harcèlement moral.
•• Voir ce qu'est le CSE >>>
Médiation
Vous pouvez aussi engager une procédure de médiation avec l'auteur des faits. Le choix du médiateur doit faire l'objet d'un accord entre les 2 parties.
Plusieurs professionnels proposent ce type de services. Vous pouvez vous renseigner auprès de votre employeur.
Le rôle du médiateur est de tenter de concilier les parties. Il leur soumet par écrit des propositions en vue de mettre fin au harcèlement : un changement de poste pour l'auteur des faits par exemple.
En cas d'échec de la conciliation, le médiateur doit vous informer de la manière de faire valoir vos droits en justice.
Saisine du tribunal administratif
Vous pouvez poursuivre votre administration devant le tribunal administratif et demander réparation de votre préjudice. Vous devez présenter des preuves directes ou indirectes de ce harcèlement : mails, témoignages...
Pour cela, vous devez d'abord saisir votre administration pour lui demander d'agir (sanctions contre un supérieur...). Votre administration pourra alors être jugée, le cas échéant, pour ne pas vous avoir protégé contre le harcèlement.
Si votre administration refuse d'agir ou ne vous répond pas, vous pouvez saisir le tribunal administratif. Vous pouvez aussi poursuivre votre administration si vous avez été sanctionné pour avoir dénoncé un cas de harcèlement.
Vous devez saisir le tribunal dans un certain délai, qui varie selon la situation :
- si l'administration a pris une décision explicite, vous avez 2 mois après la notification de la décision concernée (refus de sanction d'un supérieur, sanction pour dénonciation...) pour saisir le tribunal,
- si l'administration ne vous a pas répondu dans un délai de 2 mois, vous devez saisir le tribunal administratif dans un délai de 4 mois après la réception de votre demande par votre administration.
Saisine de la justice pénale
Vous pouvez aussi poursuivre au pénal l'auteur direct du harcèlement.
Cette plainte peut venir en complément d'une plainte contre votre administration. Par exemple, vous pouvez poursuivre votre administration devant le tribunal administratif et votre chef de service au pénal.
La victime peut porter plainte dans un délai de 6 ans à partir du fait le plus récent de harcèlement (derniers propos tenus, dernier mail...). La justice prendra alors en compte tous les faits de harcèlement venant du même auteur. Et ce, même si le harcèlement dure depuis plusieurs années.
En tant que victime, vous pouvez bénéficier de la protection fonctionnelle.
À noter :
tout syndicat représentatif peut, avec votre accord écrit, engager à votre place une action en justice. Le syndicat agir en votre nom et pour votre compte.
Saisine du Défenseur des droits
Si le harcèlement moral vous paraît motivé par une discrimination basée sur un des critères interdits par la loi, comme par exemple la couleur de la peau, le sexe, l'âge ou l'orientation sexuelle, vous pouvez aussi saisir le Défenseur des droits.
•• Sources >>>
Le licenciement du·de la salarié·e dénonçant un comportement sans le qualifier de harcèlement est-il nul ?
Le 05/10/2017
Le licenciement d’un·e salari·e s’étant plaint d’un comportement abject n’est pas nul si ce dernier n’a pas dénoncé des faits qualifiés par lui de harcèlement moral, affirme la Cour de cassation par une décision dont la portée exacte mériterait à tout le moins d’être précisée.
L’employeur ne doit pas licencier un·e salarié·e au motif qu’il·elle a témoigné ou relaté des agissements de harcèlement moral ou sexuel (C. trav. art. L 1152-2 et L 1153-3).Un licenciement prononcé pour un tel motif est nul de plein droit (C. trav. art. L 1152-3 et L 1153-4), sauf mauvaise foi du salarié, qu’il revient à l’employeur de prouver et qui ne peut pas résulter de la seule circonstance que les faits allégués ne sont pas établis (Cass. soc. 10-3-2009 n° 07-44.092 FP-PBR : RJS 6/09 n° 496 ; Cass. soc. 13-2-2013 n° 11-28.339 F-D : RJS 4/13 n° 260).
Faut-il, pour bénéficier de cette protection contre les mesures de rétorsion, que le salarié revendique expressément la qualification de harcèlement moral pour les faits qu’il dénonce ?
C’est la question que l’on peut se poser à la lecture d’un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 13 septembre 2017, destiné à être publié au bulletin des chambres civiles. Bien qu’une lecture littérale de cet arrêt puisse le laisser penser, cette position mérite à notre sens d’être nuancée.
Dans cette affaire, le directeur commercial d’une société avait été licencié pour faute grave, l’employeur lui reprochant, dans la lettre de licenciement, d’avoir notamment abusé de sa liberté d’expression et proféré des accusations diffamatoires dans un courriel dans lequel l’intéressé affirmait subir des comportements « abjects, déstabilisants et profondément injustes ».
Estimant avoir été licencié pour avoir relaté des agissements de harcèlement moral, le salarié a réclamé en justice la nullité de son licenciement et sa réintégration dans l’entreprise.
Pour accueillir ces demandes, la cour d’appel a retenu que dans le courriel en cause le salarié avisait l’employeur de son souhait de l’informer de vive voix du traitement qu’il estimait être en train de subir, et que l’intéressé visait ainsi des agissements de harcèlement moral même si ces termes n’étaient pas formellement employés.
Cette solution est censurée par la Cour de cassation qui reproche aux juges du fond de ne pas avoir tiré les conséquences légales de leurs constatations, dont il résultait que le salarié n’avait pas dénoncé des faits qualifiés par lui d’agissements de harcèlement moral.
Cette solution peut signifier que le salarié qui n’invoque pas la qualification de harcèlement au moment où il dénonce les faits en cause ne peut pas ensuite réclamer la nullité de son licenciement en application de l’article L 1152-3 du Code du travail.
Cependant, une telle interprétation semble introduire une différence difficilement compréhensible entre la protection accordée au salarié qui dénonce des faits en invoquant la qualification de harcèlement, quand bien même les faits ne seraient pas établis ou ne seraient pas qualifiés de harcèlement par le juge, protection qui perdure tant que l’employeur ne prouve pas sa mauvaise foi, et l’absence de toute protection pour celui qui dénonce des agissements circonstanciés dont il mesure la négativité, l’impact sur les conditions de travail ou l’atteinte à la dignité des personnes, sans pour autant évoquer formellement un harcèlement moral.
A notre avis : une autre interprétation est possible : si le salarié ne nomme pas le harcèlement moral, il devrait au moins avoir fait état de faits suffisamment précis pour pouvoir être qualifiés ainsi. Or, en l’espèce, le salarié ne faisait part d’aucun fait précis mais de comportements décrits comme abjects, déstabilisants et injustes, sans aucun détail sur la nature des comportements en cause, empêchant ainsi toute qualification des faits, y compris par l’employeur.
Un salarié qui, à l'inverse, décrirait des agissements répétés tels des insultes, une mise à l’écart, des brimades, une rétrogradation, sans pour autant les qualifier expressément de harcèlement moral pourrait obtenir l’annulation de son licenciement s’il était motivé par cette dénonciation.
En pratique : dans l'attente d'éclaircissements de la Cour de cassation sur ces questions, les salariés sont incités, lorsqu'ils dénoncent ou témoignent d'agissements de harcèlement, à préciser systématiquement que ces faits relèvent à leurs yeux de la qualification de harcèlement, moral ou sexuel selon le cas, pour bénéficier de la protection contre les mesures de rétorsion.
Aliya BEN KHALIFA
Prévention du harcèlement moral : L’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention remplit son obligation légale de sécurité de résultat
- 26 octobre 2016
L’arrêt N°15-14005 de la Cour de cassation du 22 septembre 2016 a indiqué qu’un employeur qui justifie avoir pris les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail sur les principes généraux de prévention, remplit son obligation légale de sécurité de résultat lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ce principe s’applique, y compris au sujet des mesures de prévention du harcèlement moral des salariés.
Dans ce litige, à la suite de l’altercation verbale entre deux salariés, l’employeur avait immédiatement mis en place une organisation et des moyens adaptés en appelant l’auteur de l’agression, en lui intimant de ne plus revenir dans l’entreprise et en invitant le salarié agressé à déposer plainte. Le salarié a été débouté de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur.
L’obligation de sécurité et de résultat de l’employeur
Les articles L4121-1 et suivants du Code du Travail déterminent les obligations de l’employeur au sujet des principes généraux de prévention pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés au travail.
L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :
- Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
- Des actions d’information et de formation ;
- La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
Cette obligation de sécurité de résultat s’applique si un salarié est victime sur le lieu de travail de violences physiques ou morales, ou des agissements de harcèlement moral.
L’obligation de sécurité de résultat est un Principe Général du Droit dont l’employeur doit assurer l’effectivité et l’efficacité. En cas de contentieux juridique, l’employeur aura la charge de la preuve qu’il a pris toutes les mesures nécessaires efficaces pour remplir son obligation de sécurité.
A défaut, la responsabilité de l’employeur est engagée de plein droit, même si l’employeur avait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.
La notion de faute inexcusable de l’employeur est prévue à l’article L452-1 du Code de la Sécurité Sociale, et peut être retenue contre un employeur, si un ou des travailleurs étaient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au CHSCT – Comité d’Hygiène Sécurité et des Conditions de Travail – avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé.
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La fiche : le harcèlement moral individuel
Bien souvent, nos équipes syndicales sont interpellées par des collègues qui se plaignent de harcèlement. Souvent, la souffrance qu’éprouvent ces collègues est
très forte. L’enjeu d’une intervention syndicale est de sortir le/la salarié-e qui se sent harcelé-e d’un isolement qui peut conduire aux plus tragiques extrémités. Un isolement bien trop souvent savamment construit, minutieusement élaboré, par des méthodes de management décidées à traquer le « maillon faible »… voire à le fabriquer de toute pièce.
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Les fiches outils : informations utiles sur les conditions de travail, la santé au travail, les CSE (ex CHSCT)...
Vous trouverez ici les fiches rédigées par la commission Santé au travail de Solidaires avec toutes les informations utiles sur les conditions de travail, la santé au travail, les CHSCT...
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Documents types en cas de difficultés à faire respecter vos droits
Vous trouverez ici des documents types en cas de difficultés à faire respecter vos droits. Elles ont été rédigées par nos camarades de SUD Travail et affaires sociales. Elles sont regroupées dans un document unique dans cette rubrique et réparties selon les thèmes dans les articles joints.
Pour télécharger la totalité de la brochure :
• 26 modèles de lettres pour faire respecter ses droits ses droits.